La veille du passage de l’ouragan Ian à Cuba, 50 000 personnes ont été évacuées et emmenées dans 55 abris. Le 1er octobre, moins de cinq jours après qu’il ait touché l’île, l’électricité avait été rétablie pour 82 % des habitants de La Havane. Les travaux se poursuivaient dans la partie occidentale de Cuba. Regardez aussi cette vidéo.
Le cyclone tropical Ian a frappé la province occidentale cubaine de Pinar del Río le 27 septembre 2022. Des vents soutenus d’environ 200 kilomètres par heure ont soufflé sur Cuba pendant plus de huit heures, abattant des arbres et des lignes électriques et causant des dégâts pires que lors de cyclones tropicaux précédents. L’ouragan s’est ensuite attardé au-dessus des eaux chaudes du golfe du Mexique, regagnant en puissance avant de frapper l’île de Cayo Costa, en Floride, aux États-Unis, avec des vents d’environ 250 km/h. L’Organisation météorologique mondiale (OMM) a qualifié cet ouragan de « l’un des plus violents dans la région depuis un siècle ».
Le centre de prévision climatique de l’administration nationale océanique et atmosphérique a déclaré que cette année était la « septième saison consécutive d’ouragans d’une intensité supérieure à la moyenne ». Cuba et la Floride ont toutes deux été confrontées à la furie des eaux et des vents, mais celle-ci cache la férocité de la catastrophe climatique. Selon Petteri Taalas, secrétaire général de l’OMM, « la science du climat est de plus en plus capable de démontrer que la probabilité et l’intensité de bon nombre des phénomènes météorologiques extrêmes que nous connaissons ont augmenté à cause du changement climatique provoqué par l’homme ».
Se préparer et atténuerPour l’OMM, Cuba est l’un des « leaders mondiaux en matière de préparation aux ouragans et de gestion des catastrophes ». Cela n’a pas toujours été le cas. L’ouragan Flora a frappé la côte est de l’île le 4 octobre 1963. Lorsque Fidel Castro a appris que l’ouragan s’approchait, il a immédiatement ordonné l’évacuation des maisons des personnes qui vivaient dans la trajectoire prévue du cyclone. En Haïti, l’ancien dictateur François Duvalier n’a pas, quant à lui, fait évacuer la population, ce qui a entraîné la mort de plus de 5 000 personnes. Fidel Castros’est précipité à Camagüey. En route, il a failli perdre la vie dans le fleuve Cauto, son véhicule amphibie ayant été heurté par un tronc d’arbre à la dérive. Deux ans plus tard, dans son livre Le socialisme et l’homme à Cuba, Che Guevara écrira que le peuple cubain a fait preuve d’un « courage et d’un sens du sacrifice exceptionnels » lors de la reconstruction du pays, dévasté par Flora.
En 1966, le gouvernement cubain a mis sur pied un système de défense civile pour se préparer non seulement à des phénomènes météorologiques extrêmes tels que les ouragans, mais aussi à l’apparition d’épidémies. Se basant sur la science pour se préparer aux ouragans, le gouvernement cubain a pu évacuer 2 millions de personnes alors que l’ouragan Ivan approchait de l’île en 2004. Dans le cadre de la gestion des catastrophes, l’ensemble de la population cubaine participe à des exercices. Les organisations de masse cubaines (la Fédération des femmes cubaines et les Comités de défense de la révolution) travaillent de concert pour mobiliser la population en vue de faire face aux catastrophes.
La veille du passage de l’ouragan Ian sur Cuba, 50 000 personnes ont été évacuées et emmenées dans 55 abris. Il n’y avait aucun véhicule privé ou de transport en commun dans les rues. Des brigades de travail ont été mobilisées pour rétablir l’approvisionnement en électricité après le passage de l’ouragan. À Artemisa, par exemple, le Conseil de défense provincial s’est réuni pour discuter de comment réagir aux inondations, qui étaient inévitables. Malgré tous les efforts déployés par les Cubains, l’ouragan a fait trois morts et le réseau électrique a subi d’importants dégâts.
DégâtsL’île entière, y compris La Havane, est restée sans courant pendant plus de trois jours. Le réseau électrique, qui avait déjà bien besoin de réparations importantes, a craqué. Sans électricité, les Cubains ont dû jeter des aliments qui devaient être réfrigérés et ont notamment peiné à préparer leurs repas. Le 1er octobre, moins de cinq jours après le passage de l’ouragan, l’électricité avait été rétablie pour 82 % des habitants de La Havane. Les travaux se poursuivent dans la partie occidentale de l’île. Les coupures de courant durent plus longtemps à Porto Rico, frappée par l’ouragan Fiona le 18 septembre. Plus de deux semaines après la catastrophe, un quart de million de personnes sont encore et toujours sans électricité.
Les conséquences à long terme de l’ouragan Ian n’ont pas encore été évaluées, mais certains s’attendent à ce que le coût des dommages dépasse le milliard de dollars. Plus de 8 500 hectares de terres cultivées ont été touchés par les inondations, en particulier celles consacrées à la culture de la banane. C’est l’industrie cubaine du tabac qui sera le plus gravement affectée car elle est centrée sur Pinar del Río. Cette zone représente 65 % de la production de tabac du pays et a vu 5 000 de ses exploitations détruites. Hirochi Robaina, cultivateur de tabac à Pinar del Río,a écrit : «
C’était apocalyptique. Un vrai désastre. »
Le blocusLe Mexique et le Venezuela se sont immédiatement engagés à envoyer du matériel pour aider à reconstruire le réseau électrique de l’île.
Tous les regards se sont tournés vers Washington, non seulement pour savoir si les États-Unis allaient envoyer de l’aide, qui serait la bienvenue, mais aussi s’ils allaient rayer Cuba de la liste des États soutenant le terrorisme et mettre fin aux sanctions qu’ils lui imposent. Ces mesures font en effet que les banques, tant aux États-Unis qu’ailleurs, sont réticentes à traiter toute transaction financière, y compris les dons humanitaires. Les États-Unis ont un bilan mitigé en ce qui concerne l’aide humanitaire apportée à Cuba. Après l’ouragan Michelle (2001), l’ouragan Charley (2004) et l’ouragan Wilma (2005), les États-Unis ont certes proposé leur aide, mais se sont refusés à lever le blocus, même provisoirement. Après l’incendie qui a ravagé un site de stockage de pétrole à Matanzas en août 2022, les États-Unis ont proposé de se joindre au Mexique et au Venezuela pour aider les Cubains à éteindre l’incendie. Le vice-ministre cubain des Affaires étrangères, Carlos Fernández de Cossio, a exprimé sa « profonde gratitude » pour ce geste, auquel le gouvernement du président Joe Biden n’a toutefois pas donné suite.
Plutôt que de lever les sanctions, même pour une période limitée, le gouvernement des États-Unis est resté les bras croisés tandis que de mystérieuses forces venues de Miami inondaient Facebook et WhatsApp de messages destinés à inciter les Cubains désespérés à descendre dans les rues. Washington n’hésite pas une seule seconde à exploiter jusqu’à une catastrophe naturelle pour tenter de déstabiliser la situation à Cuba. Une tendance que le gouvernement des États-Unis affectionne depuis 1963, lorsque la Central Intelligence Agency s’est demandée comment tirer parti des catastrophes naturelles à des fins politiques. « La plupart des gens ne réclament pas la liberté », nous a expliqué une personne qui a observé l’une de ces manifestations. « Ce qu’ils demandent, c’est du courant et de la nourriture. » «
Ils demandent du courant et de la nourriture. » Globetrotter.