Récit du voyage de cubanismo.be à Cuba en été 2022 (3 parties).
Du 16 juillet au 2 août, Cubanismo.be a accompagné 25 membres pendant leur voyage sur l’île de Cuba socialiste. Avec ce groupe sympathique et solidaire de néerlandophones et de francophones, d’hommes et de femmes d’âges différents et provenant de divers secteurs, nous avons (re)découvert de nos propres yeux et oreilles l’île rebelle des Caraïbes. Nous sommes partis avec de nombreuses questions et, dans nos valises, des dons d’amis et d’organisations. Nous avons vu les conséquences du blocus criminel imposé par les États-Unis, mais aussi la fierté, la solidarité et la volonté du peuple cubain. Nous sommes revenus avec des réponses (et encore des questions) et surtout avec la conviction que nous voulons – plus que jamais – soutenir les Cubains. Voici un premier rapport succinct. Un certain nombre de participants prendront la parole à Ostende dans la tente de Che Presente à ManiFiesta De La Havane à Santiago de Cuba, partout le blocus frappe durement..
Avec José-Luís au volant et la guide Idalmy, dans un bus chinois, nous visitons les provinces de La Havane, Cienfuegos, Villa Clara, Camagüey Ciego de Avila et Santiago de Cuba. Nos impressions ne se limitent donc pas à la capitale, La Havane, où l’on voit par exemple relativement plus de personnes avec un smartphone. De plus en plus de cyclomoteurs et de tricycles électriques font leur apparition dans les rues. Ici et là, il faut faire la queue à une station-service. Les files d’attente sont un spectacle familier, tout comme les nombreuses petites échoppes, que ce soit dans la rue ou par la fenêtre d’une maison. Les magasins MLC, onéreux pour le Cubain moyen – où l’on ne peut acheter qu’avec des devises étrangères et généralement uniquement avec une carte bancaire – sont bien approvisionnés, mais l’offre est limitée.À La Havane, seule la moitié des bus nécessaires sont en service parce que l’autre moitié reste au dépôt, faute de pièces de rechange ou de matériel de réparation. Dans certains hôtels, la pénurie est perceptible : manque d’eau (en bouteille) et de nourriture variée, travaux de réparations nécessaires.
Un de nos voyageurs a dû se rendre à l’hôpital après un accident bénin pour faire cautériser une petite blessure à la tête. Aucun matériel de suture chirurgicale n’est disponible et nous devrons nous adresser à un autre hôpital. Il n’y a aucun souci en ce qui concerne le personnel médical et les soins, mais le matériel et les médicaments posent un gros problème. Il y a clairement moins de touristes, entre autres à cause des mesures de Trump, sur lesquelles le nouveau président Biden n’est pas revenu malgré ses promesses électorales. Le gouvernement cubain tente de mettre la main sur un maximum de devises étrangères, notamment en rendant quelquefois les paiements électroniques obligatoires. À notre arrivée, le taux de change officiel est de 24 pesos pour 1 euro. Dans la rue, on change 100 pesos pour 1 euro, et peu de jours après notre départ, le taux de change officiel (pour les particuliers) était porté à… 120 pesos pour 1 euro !
Les gens font des petits boulots pour arriver à s’en sortir. Au cours d’une promenade dans la vieille Havane, nous rencontrons une professeure de chant qui vend des cacahuètes pour gagner un petit quelque chose en plus… Nous voyons à quel point le manque de ressources financières et matérielles bloque tant de beaux projets et de nombreux talents. Malgré le blocus qui l’étrangle, Cuba n’est pas un État en panne : les besoins sont élevés, mais les institutions fonctionnent, et les Cubains ne capitulent pas. « Aquí no se rinde nadie » (Ici, personne ne se rend), a crié un guérillero lors d’un combat. Un slogan à mettre à côté d’un autre : Hasta la victoria siempre ! (Toujours pour la victoire.)La parole aux CubainsNotre programme de voyage comprend de nombreuses rencontres avec diverses organisations ainsi qu’un certain nombre de sites touristiques, et nous avons également fait quelques rencontres non prévues au programme. Par exemple Teresa, qui était notre invitée en Belgique en 2020, nous emmène à une fête de quartier organisée par le CENESEX, l’organisation qui défend les droits des transgenres et des LGBT. À notre grande surprise, nous y rencontrons Mariela Castro . Elle nous gratifie immédiatement d’une explication fascinante sur les droits des personnes transgenres et la nouvelle loi sur la famille à Cuba, dont la 25e version sera soumise à un référendum en septembre.. Après un large débat au sein de la population, plus de 6 millions de personnes ont assisté à l’une des 79 000 réunions ! Près de la moitié du projet de loi a été réécrite. La nouvelle loi généralise et renforce l’égalité des sexes , assure une meilleure protection des enfants et rend notamment possible le mariage entre personnes de même sexe. Mariela souligne que la démocratie à Cuba est une question de débat au sein de la société et des diverses organisations de la société civile qui sont proches de la population. La jeunesse, ce n’est pas seulement l’avenir, mais aussi le présent.
Lors de la première journée de notre programme, nous sommes accueillis par Fernando Gonzalez, le président de l’ICAP*, et Geri, le responsable de l’ICAP pour le Moyen-Orient. Nous avons parlé de la lutte des Palestiniens et des liens entre Cuba et le peuple palestinien. L’après-midi nous nous entretenons avec Juan-Carlos Marsan, le responsable des relations internationales du PCC, et Belkys Ghislay, le responsable pour l’Europe. Nous parlons du rôle du parti dans la construction du socialisme, des défis économiques et de la lutte pour la paix. Ils abordent ces sujets avec franchise, même les problèmes compliqués comme l’inflation, l’émigration, la corruption, les médias sociaux…
Nous nous souviendrons certainement de cette déclaration : « La jeunesse n’est pas seulement l’avenir, mais aussi le présent. » Ils soulignent ainsi l’importance d’accorder rapidement des responsabilités aux jeunes. L’âge moyen des dirigeants provinciaux est aujourd’hui de 49 ans, alors que les femmes n’ont pas encore suffisamment accédé à des postes dirigeants.
Médecine pour et parmi le peupleNotre visite à l’une des très nombreuses polycliniques disséminées dans tout Cuba et à un médecin de famille (1 médecin pour 1000 habitants en 2018) montre des soins de santé proches des gens et basés sur la prévention. Le médecin de famille connaît les habitants du quartier et rend régulièrement visite aux personnes âgées et aux plus faibles pour voir comment elles se portent. À l’hôpital, nous rencontrons aussi plusieurs étudiants étrangers qui y effectuent leur stage. Ils viennent de tous les continents, même des États-Unis, et bénéficient d’une formation totalement gratuite à Cuba. Le développement de cinq vaccins cubains contre le Covid-19 (dont deux ont été utilisés et trois sont encore en cours d’essais cliniques) remplit de fierté tous les Cubains. Plus de 99 % de la population a été vaccinée et 95 % a reçu un rappel de vaccin. Le taux de contamination quotidien est inférieur à 40 cas, et cela fait deux mois qu’il n’y a plus eu de décès dus au Covid. L’île exporte désormais ses vaccins au Vietnam, au Venezuela et en Biélorussie. Le plus grand défi pour le personnel soignant cubain est toujours de se procurer des médicaments et des équipements (médicaux) en quantité suffisante. Nous faisons un don de la part de Médecine pour le Peuple et de Belges solidaires. Peut-être n’est-ce là qu’une seule goutte d’eau dans l’océan, mais elle est très appréciée.
Syndicats et directions, travailleurs culturels et associations de quartiersAprès quatre jours, nous laissons derrière nous l’effervescence de La Havane, en gardant à l’esprit les avertissements de coupures de courant dans l’intérieur du pays. Nous mettons le cap sur Cienfuegos, une importante ville portuaire au riche passé culturel. Nous y sommes reçus par la section portuaire du syndicat des transports. Un de nos compagnons de voyage travaille dans une usine qui a un département portuaire. Il est surpris de la présence du directeur du port lors de la rencontre. Cette situation n’est pas inhabituelle à Cuba, où direction et syndicat coopèrent et où le personnel a son mot à dire dans la gestion de l’entreprise. Comme à chaque rencontre, les femmes sont bien présentes. Là aussi s’applique la règle : un syndicat diversifié est un syndicat fort. Nous lisons le message de solidarité d’un syndicaliste du port d’Anvers.
Dans la deuxième partie, on parle de la culture, des banques, de la démocratie, de l’agriculture organique, de Fidel et des nouveaux acteurs économiques.
Dans la troisième partie, il s’agit des femmes révolutionnaires, la campagne d’alphabétisation… et d’un nouveau voyage.
Dimanche 18 septembre, venez à la tente de Che Presente à Manifiesta, de 13 à 14 heures, et suivez l’entretien avec quelques participants de ce voyage.* ICAP : Instituto de la Amistad de los Pueblos, l’Institut de l’Amitié des Peuples, le coordinateur officiel de la solidarité internationale avec Cuba.