Che Presente (11 09 21 à Ostende) est synonyme de solidarité avec Cuba. La Coordination pour la Levée du Blocus a organisé une réunion de lutte à laquelle de nombreuses personnes ont participé. Koen Vanbrabandt, Jan Van de Maele, Tania Crombet et Fernando Gonzalez ont pris la parole sous la direction de Silvie Mariën. Un compte rendu. La Centrale Générale de la FGTB entretient de bonnes relations avec les syndicats à Cuba depuis 15 ans. Koen Vanbrabandt: la vraie cause de la situation difficile dans laquelle Cuba se trouve actuellement est le blocus, qui dure déjà plus de 60 ans. Le blocus prive l’économie du pays de 144 milliards de dollars. Imaginez-vous que ce soit l’économie belge! De plus, Trump a pris plus de 240 mesures supplémentaires. En tant que syndicat, nous avons aussi déjà été confrontés au blocus, quand nous avons organisé un voyage d’échange à Cuba. La Banque fédérale des Etats-Unis avait arrêté l’argent pour louer un autocar à Cuba; nous n’avons jamais récupéré l’argent. La construction fait face à un manque important de ciment et d’autres matériaux. Cuba a de grands projets touristiques, mais le pays est confronté à des difficultés au niveau de l’importation. Suite à la crise du coronavirus, de nombreux enfants suivent actuellement un enseignement à distance via la télé. Or, l’enseignement doit toujours travailler avec de vieux appareils de télévision. Biden est-il meilleur? Pour l’instant pas. Biden n’a retiré aucune mesure de Trump. Les “remesas” (les virements venant de l’étranger que de nombreux Cubains reçoivent) ont été limitées. Une coopération avec Western Union n’est plus possible à Cuba. Les dirigeants de chaînes hôtelières étrangères ne peuvent plus rentrer aux Etats-Unis. Les banques et les sociétés d’assurance se voient infliger des amendes.
Jan Van de Maele habite à Santiago de Cuba depuis sa retraite, entre-temps déjà 3 ans.
Chaque pays croît par l’importation et l’exportation. Or, la perte annuelle de 4 milliards de dollars à cause du blocus freine énormément l’économie cubaine. Maintenant que, à cause de Corona, les revenus du tourisme ont aussi complètement disparu, le pays est confronté à d’importantes pénuries de nourriture et de médicaments. Concrètement, vous avez besoin de médicaments, mais ils ne sont pas là. Tout ce que vous pouvez faire, c’est attendre, attendre qu’ils arrivent. Vous vous rendez à la pharmacie, mais il s’avère que le produit est déjà épuisé, car il n’a pas été livré en quantité suffisante. Il en va de même pour la nourriture, pour l’essence. Les États-Unis punissent les pétroliers qui veulent livrer du pétrole à Cuba. Cela crée des files d’attente interminables dans les stations-service. C’est le combat quotidien des Cubains. Afin d’éviter des heures d’attente devant un magasin, un système d’enregistrement a été mis en place. Le gérant du magasin décide à l’avance du nombre de clients qu’il peut accueillir ce jour-là, par exemple 150. À 6 heures du matin, les gens font déjà la queue ; à 7 heures, le gérant distribue 150 tickets avec l’heure à laquelle la personne peut venir. Au moins, cela évite aux gens de faire la queue pendant des heures pour s’apercevoir que les produits qu’ils veulent sont épuisés. Tania Crombet Ramos est médecin et scientifique impliquée dans la recherche sur le cancer et le développement des vaccins corona. À Cuba, l’espérance de vie est de 78 ans et le nombre de patients atteints de cancer est donc également en augmentation. Nous menons nos propres recherches à Cuba sur les médicaments renforçant l’immunité contre le cancer car, en raison du blocus, nos patients n’ont pas accès aux médicaments les plus avancés. De nombreuses recherches sont menées au niveau international et les médicaments font de grands progrès. Mais tant que les brevets sur ces médicaments sont en place, Cuba ne peut pas les acheter. Et cela coûte des vies !
La plupart des appareils modernes sont touchés par le blocus, car ils contiennent au moins 10 % de composants américains. Les fluides réactifs, désormais si importants pour le corona, doivent être achetés dans des pays tiers, parfois avec un délai de livraison d’un an. 50 % des médicaments sont entre les mains de sociétés américaines, et inaccessibles pour nous. D’autre part, Cuba exporte des médicaments vers 80 pays, ce qui représente 4 % des exportations totales. Mais exporter vers les États-Unis est impossible. En raison de toutes ces limitations, il est évident que Cuba est déterminé à développer ses propres vaccins corona. Nous avons cinq vaccins en développement, dont trois ont déjà reçu une autorisation provisoire d’urgence. La campagne de vaccination bat son plein et nous sommes le premier pays à vacciner les enfants dès l’âge de deux ans. Mais là aussi, le blocus nous joue des tours. Nous avons une pénurie de seringues, de matériel de protection. Nous avons dû reporter à novembre notre projet de vacciner 70 % de la population à la fin du mois d’août. Fernando Gonzalez Llort, un des Cuban Five et président de l’ICAP – Institut cubain de l’Amitié des Peuples, a insisté sur l’intérêt des actions contre le blocus. Je suis impressionné par la sensibilité avec laquelle les autres orateurs esquissent la réalité de la vie quotidienne des Cubains.
En Belgique, nous avons déjà vu que des conteneurs de matériel médical sont envoyés à Cuba. C’est important, car notre pays n’a pas la capacité financière en raison du blocus. Le premier objectif de la solidarité internationale est de mettre fin au blocus, mais entre-temps les actions humanitaires peuvent aider. Nous constatons aussi que les derniers mois, le nombre d’actions contre le blocus a augmenté. Il est important de faire connaître la situation réelle de Cuba. Les Etats-Unis ont l’intention de nous imposer un système que notre pays ne veut pas. Cuba est un pays autonome. Comme vous savez, l’Assemblée Générale des ONU a condamné le blocus américain pour la 29ème fois. Le blocus est criminel, car il veut faire mourir notre population de faim. Que pouvons-nous attendre de Biden? Je ne sais pas ce qu’il pense. Comme vice-président sous Obama, il a soutenu l’assouplissement des relations. Or, depuis sa désignation, il n’a procédé à aucun assouplissement. Bien au contraire, de nouvelles sanctions ont été faites sous son mandat. Je voudrais qu’il soit d’avis personnel que le blocus doit arrêter. Or, je vois qu’il se laisse diriger par d’autres intérêts. Peu importe qui siège à la Maison Blanche, le président évalue ce qui est le plus avantageux au niveau politique: maintenir la politique actuelle ou la changer.
Quoi que Biden décide, nous suivrons notre propre chemin.