Cuba a envoyé des brigades médicales en Italie et Andorre, mais également dans dix autres pays de par le monde, ce qui lui vaut un grand respect au niveau international. Si l’île elle-même n’est pas épargnée par le COVID19, son système de santé publique bien développé lui permet d’être mieux préparée à faire face que beaucoup d’autres pays. Mais la crise du coronavirus vient se greffer sur une autre crise, celle que crée le blocus américain contre l’île. À terme, la conjonction de ces deux crises plongera l’île dans des conditions économiques encore plus difficiles. Notre solidarité internationale peut ainsi représenter une aide considérable pour Cuba.
Le contexte unique de CubaCuba compte actuellement 233 patients infectés par le coronavirus COVID-19/SARS-CoV-2. Six d’entre eux en sont malheureusement décédés. 2 742 personnes sont hospitalisées en observation, et 26 000 autres sont suivies à domicile par un service de soins de santé de première ligne.
L’île socialiste a mis en place l’un des systèmes de santé publique les plus développés au monde, et ce, avec un produit intérieur brut (PIB) 10 fois inférieur à celui de la Belgique. À Cuba, tous les indicateurs de santé se situent au niveau de l’UE, et bien au-dessus des valeurs des États-Unis. En effet, l’accent est mis sur la prévention et les soins de santé de première ligne. La révolution cubaine repose sur le principe que la santé est un droit fondamental, et non une marchandise. Et c’est le gouvernement, et non l’économie, qui est aux commandes. Par conséquent, des stocks stratégiques de masques buccaux et de matériaux de protection sont toujours disponibles et la stratégie à long terme du pays vise l’intérêt des personnes et non la création de marges bénéficiaires.
Cuba est sous le coup d’un blocus financier et économique américain depuis plus de 60 ans. Les États-Unis font également pression sur d’autres pays pour qu’ils ne s’engagent pas dans des transactions commerciales ou financières avec Cuba, ce qui a un impact majeur en termes de disponibilité de devises fortes. Cela signifie par ailleurs que Cuba est confrontée à une pénurie de ressources financières et matérielles, y compris dans le secteur de la santé.
Le blocus affecte les soins de santéCuba jouit, à juste titre, d’un grand respect pour son système de santé, dans lequel s’inscrit aussi l’envoi de brigades médicales internationales, comme actuellement en Italie. Il ne faudrait toutefois pas oublier que ce résultat est là, malgré le blocus illégal que les États-Unis imposent à l’île depuis plus de 60 ans et qui entrave le développement des Cubains depuis tout ce temps. Les sanctions nord-américaines ont privé le système de santé cubain de 104 millions de dollars (environ 98 millions d’euros) entre avril 2018 et mars 2019. Les services de santé sont parmi les premiers à pâtir du blocus. Les principaux fabricants de médicaments ou de matériel médical moderne sont situés aux États-Unis. Cuba n’ayant pas le droit d’acheter ce matériel, elle doit se tourner vers des alternatives souvent plus coûteuses et plus difficiles à obtenir. Heureusement, Cuba produit elle-même beaucoup de médicaments génériques, mais lorsqu’il s’agit de matériel médical (y compris pour l’assistance respiratoire), la situation est loin d’être brillante.
L’aide de solidarité nécessaire que pourrait fournir la Chine (des milliers de masques, des kits médicaux de tests rapides ou encore des équipements de protection) ne peut pas atteindre Cuba. Pourquoi ? Parce que cette aide devait être acheminée par une société de transport nord-américaine, or elle a annulé sa livraison en dernière minute, en raison de lois américaines liées au blocus qui lui interdisent de livrer à Cuba.
Les Cubains ont vécu des moments très difficiles ces derniers mois. Le gouvernement Trump a encore renforcé le blocus contre Cuba l’année dernière. Par exemple, les compagnies maritimes étrangères qui transportent des marchandises vers Cuba depuis d’autres pays sont effectivement sanctionnées. Cela entrave les livraisons de pétrole, de nourriture et d’autres échanges commerciaux essentiels aux besoins quotidiens des citoyens cubains. Une grande partie de la nourriture est distribuée au moyen de tickets de rationnement, ce qui provoque de longues files d’attente dès que du poulet, du détergent ou du carburant sont disponibles.
La pandémie de coronavirusC’est surtout la conjonction de l’impact économique de la crise du coronavirus et de celui du blocus qui aura des conséquences majeures à long terme. Le 24 mars, par exemple, Cuba a décidé de ne plus autoriser les touristes à accéder au pays et d’organiser le rapatriement des 60 000 touristes présents à ce moment-là. Le gouvernement adhère ainsi à l’un des principes de base du pays, à savoir que la santé des gens passe avant tout. Or, il se trouve que la majorité des infections à COVID19 sont arrivées à Cuba via le tourisme.
En raison des récentes sanctions prises par Trump pour interdire les vols réguliers et les croisières à destination de l’île en provenance des États-Unis, cela fait longtemps que les touristes nord-américains ont déserté Cuba. Aujourd’hui, l’industrie du tourisme est au point mort, ce qui représente des millions de dollars de manque à gagner pour le pays. Représentant 10 % du PIB, ce secteur est pourtant un pilier de l’économie du pays et lui garantit des rentrées en devises étrangères, dont Cuba a besoin pour acheter de la nourriture, des outils et des matières premières sur les marchés financiers internationaux, car sa propre monnaie est bloquée par les États-Unis. Les deux crises se renforcent mutuellement. Le manque de recettes provenant du tourisme fait que moins de moyens sont disponibles pour lutter contre le coronavirus. La pénurie alimentaire est à l’origine de longues files d’attente qui facilitent la propagation du virus.
L’impérialisme nord-américainEn imposant sa politique de sanctions, l’administration Trump entend évidemment provoquer l’effondrement du système économique des pays soumis au blocus. En ce sens, les sanctions infligées à Cuba ne diffèrent pas de celles que subissent le Venezuela ou l’Iran. Elles visent toutes à inciter les populations locales à se retourner contre leur gouvernement, voire, pour ainsi dire, à « réclamer » une intervention militaire ou un autre gouvernement. Il s’agit donc, ni plus ni moins, d’une guerre économique plutôt que militaire, mais dont l’objectif reste un « changement de régime ».
La population est la première à pâtir de ces sanctions, dans la mesure où elles frappent le plus durement des secteurs clés tels que la distribution alimentaire ou les soins de santé. Dans le cadre de cette pandémie, les États-Unis vont jusqu’à utiliser ces sanctions comme une arme pour faire s’effondrer les systèmes de santé. Alors que des citoyens et citoyennes américains meurent par milliers en raison de la faillite des soins de santé et de la sécurité sociale aux États-Unis mêmes, le gouvernement Trump n’a rien trouvé de mieux à faire la semaine dernière que menacer militairement le Venezuela, un allié clé de Cuba.
Les sanctions sont inacceptables pendant cette pandémie. Michelle Bachelet, Haut Commissaire des Nations Unies aux Droits de l’homme, a réclamé une levée du blocus, déclarant : « Dans un contexte de pandémie mondiale, les mesures qui entravent les soins médicaux augmentent le risque auquel nous sommes tous confrontés ». Entre-temps, le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterrez, a également appelé à lever les sanctions contre les pays du monde entier.
Le gouvernement cubain va maintenant faire tout ce qui est en son pouvoir pour préserver la santé de toute sa population. Mais le choc économique qui suivra la pandémie de coronavirus sera violent. La solidarité que manifeste Cuba vis-à-vis du monde est exemplaire. Ne l’oublions pas, et intensifions la lutte contre le blocus américain illégal de Cuba dans les mois à venir.
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