Famine à Cuba !

Cuba Coopération France a été informé d’une rumeur, qui circule actuellement en France, il y aurait de la famine à Cuba. Questionné à ce sujet, Philippe Alder, membre fondateur du comité Lille Métropole , nous livre son témoignage depuis la municipalité de Guanabacoa à la Havane, où il réside et partage le quotidien des cubains depuis deux ans et demi.

Famine à Cuba ! Il n’en est rien , un bruit de plus une rumeur calomnieuse et infâme !

Qu’il y ait des pénuries ? Oui, mais ce n’est pas nouveau ! Depuis 14 ans que je séjourne régulièrement à Cuba, j’ai toujours constaté des pénuries de tel ou tel produit. Il y a 14 ans, il n’y avait pratiquement pas de fruits ni de légumes , il y avait beaucoup moins de marchés et de magasins que maintenant donc moins de produits et moins de diversité de produits.

Depuis les choses se sont nettement améliorées un des principaux objectifs du gouvernement visant un maximum d’indépendance alimentaire dans le pays.

Les agriculteurs peuvent à présent vendre une partie de leurs récoltes directement aux particuliers et donc sont encouragés à produire plus, travailler plus, pour gagner plus ( comme dirait l’autre, qui n’a rien inventé ). Il y a encore quelques années toute la production était destinée aux hôtels, restaurants, hôpitaux , établissements scolaires…et les récoltes étaient insuffisantes pour approvisionner les marchés des quartiers . Ce n’est plus le cas aujourd’hui et de nombreuses échoppes fixes ou mobiles ont vu le jour et proposent des produits frais et de grande qualité.

Il y a aussi beaucoup de petits commerces de cafétérias de proximité qui ont été ouverts ou repris par des Cubains depuis que la loi a permis à certaines professions de travailler pour leur propre compte . L’inconvénient c’est que ces nouveaux commerçants ont tendance à pratiquer ’’l’accaparement ’’, c’est à dire qu’ils achètent le stock d’un produit dans un magasin d’Etat à prix fixé pour le revendre à prix libre dans leurs échoppes. Ainsi par exemple un magasin d’état livré ce jour d’un stock de bière à 1,15 CUC (prix de vente aux clients) peut être en pénurie le lendemain, les commerçants privés étant passés par là, et les clients s’ils veulent de la bière, doivent l’acheter à 1,50 voir 2 CUC dans les échoppes ou cafétérias privées faute d’en trouver dans les magasins d’État. Et ceci est le cas pour de nombreux produits, ce qui aggrave forcement la situation financière d’une partie de la population, qui, compte-tenu d’un salaire insuffisant, connaît des difficultés pour accéder à ces derniers. Les autorités prennent des mesures pour limiter autant que possibles ces dérives, notamment par la vente en quantité limitée.

L’indépendance alimentaire est la meilleure défense contre des attaques telles que l’embargo , la récente réactivation de la loi Helms Burton, ou d’autres qui pourraient sait-on jamais être inventées ! Des rumeurs par exemple !

L’embargo et le non accès aux instances financières internationales ne facilitant ni les importations ni les exportations, des pénuries demeurent : Ainsi en ce mois de mai, nous avons connu par exemple une pénurie de viande de poulet durant environ trois semaines. Quand les magasins ont été réapprovisionnés ce fut la ruée : la ruée à Cuba, c’est ’’hacer la cola’’ , faire la queue , une file d’attente très bien organisée de clients qui attendent leur tour parfois quelques heures pour être servis , le tout dans une certaine bonne humeur. Le dernier arrivé interpelle la foule « ¿El ultimo ? » , comprenez « qui est le dernier arrivé ? », la personne concernée lève la main ou dit « YO » , le dernier arrivé poursuit « ¿Atras de quien ? » , comprenez « vous êtes après qui ? » et l’avant dernier de la file est désigné. On ne sait jamais combien de gens sont avant nous dans ’’la cola’’ car une fois que l’on connaît sa place, chacun peut partir faire une autre course, chercher un sandwich ou un rafraîchissement, et revenir quelque temps plus tard reprendre sa place.

La ’’cola’’ c’est presque un rite à Cuba, ça ne semble déranger personne, sauf de rares cas, les gens parlent, échangent rient ensemble, on fait connaissance ….

C’est une chose toujours très surprenante pour les touristes que de voir la queue des Cubains et Cubaines devant le Coppelia, un des rendez-vous préférés des Havanais qui sont prêts à faire ’’la cola’’ parfois plusieurs heures pour tout simplement s’attabler et manger une glace à l’eau franchement pas terrible !

Mais revenons-en à tordre le cou à cette nouvelle rumeur.

Comme chaque fois qu’il y a pénurie les gens veulent faire des provisions ( j’ai déjà vu ça en France aussi notamment avec les packs d’eau)Aussi les ventes sont limitées à une certaine quantité de produits par personne, afin qu’il y en ait pour tout le monde.

Mon avis sur cette pénurie de poulet ? je n’en sais rien mais je subodore que Cuba s’approvisionnait probablement au Brésil, premier producteur de poulets au monde si je ne me trompe. Et vu les nouvelles relations géopolitiques avec le Brésil, il a fallu trouer de nouveaux fournisseurs. Mais ce n’est qu’une supposition de ma part. Je ne voudrais pas contribuer à diffuser de fausses informations.

Ici aussi on entend des rumeurs. Certaines peuvent être vraies mais bien souvent les gens, comme partout, parlent sans savoir pour se rendre intéressants. Parmi les dernières :J’ai entendu de source pas sûre que les nouveaux arrivages de poulets provenait de France .

Toujours de source on ne peut moins sûre que nous serions à la veille d’une nouvelle  » période spéciale « ….

Pour en revenir aux pénuries dans les premiers mois de l’année nous avons manqué de farine, donc les boulangers n’ont pas pu faire de pains durant une dizaine de jours d’après mes souvenirs. Ensuite ce furent les œufs qui ont manqué , puis l’huile. Je dis d’après « mes souvenirs  » car comme les Cubains, je suis habitué et même si ça n’est pas très agréable, c’est bien loin d’être dramatique. S’il n’y a pas de poulet, on mange du cochon ou d’autres choses !

Cuba est un pays pauvre mais où il y a moins de misère que dans beaucoup de pays réputés riches de notre planète. On y mange pas toujours ce que l’on souhaiterait manger, mais on y mange, on est bien loin de la famine !

Je ne vous ai parlé que des pénuries de nourritures, et ce en tant que témoin, observateur de la vie quotidienne, je n’ai pas trop développé les pénuries sur les produits alimentaires de première nécessité . Je vous suggère plutôt de lire deux excellents articles très complets écrits par des journalistes cubains, traduits et publiés sur le site de Cuba Coopération France :’’Nouvelles mesures commerciales pour assurer la distribution des produits de base’’ par Fidel RENDON et Jose ARMANDO FERNANDEZ paru dans BOHEMIA le 10 mai 2019 et paru sur le site de Cuba Coopération France le 22 mai 2019 traduit par Gonzalo Dorado’’ La responsabilité sociale en temps de blocus renforcé : les magasins ne devraient pas aggraver les choses’’ par Javier Gomez Sanchez (La pupila insomne) paru sur le site de Cuba Coopération France le 26 mai 2019, traduit par Nicole Bedez.

Cuba coopération France

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