Cela fait 45 ans que le coup d’État du général Pinochet a renversé le président socialiste du Chili Salvador Allende, avec le soutien des États-Unis. Comme son grand-père, Pablo Sepulveda Allende est impliqué dans la solidarité internationale. Il a choisi, comme médecin, d’apporter son grain de sable à la révolution bolivarienne au Venezuela. Invité par intal et Cubanismo.net, il sera à ManiFiesta. Entretien.
Comment le petit-fils du président socialiste chilien Allende s’est-il retrouvé au Venezuela ?
Pablo Sepulveda Allende. Je vis au Venezuela depuis 2009. J’y suis arrivé en tant que médecin travaillant dans un programme de coopération entre Cuba et le Venezuela, la « Misión Barrio Adentro » telle qu’elle est appelée ici. Un peu comme cela se fait dans le système de santé cubain, les patients que je traite habitent dans le quartier, sont soignés gratuitement et sont de toutes origines sociales.À mon arrivée au Venezuela, j’ai rejoint le groupe de médecins diplômés de l’École latino-américaine de médecine (ELAM) à Cuba, une école de médecine dans laquelle se forment de très nombreux étudiants qui viennent de plein de pays différents. Notre première tâche consistait à nous rendre dans des zones difficiles d’accès. J’ai été de ce fait personnellement témoin des grands efforts du gouvernement vénézuélien mis en œuvre pour répondre aux besoins fondamentaux des secteurs historiquement exclus et pauvres.
Comment avez-vous vécu cette expérience à l’ELAM ?
Pablo Sepulveda Allende. L’ELAM a été l’un des grands projets internationalistes de Fidel Castro. Ce fut une expérience inestimable. C’était un apprentissage dans tous les sens du terme. Partager avec des personnes de différents pays et cultures pour devenir des médecins conscientisés a renforcé notre volonté de mener une lutte commune pour la santé et le bien-être des peuples.
Alors que la plupart des universités forment des professionnels avec une approche individualiste et mercantile visant à atteindre le prestige social à travers une carrière de médecin, nous avons été formés pour servir la collectivité.
Quelle est la situation actuelle au Venezuela et sur le continent latino-américain ?
Pablo Sepulveda Allende. Depuis la fin du XXe siècle, le Venezuela est l’épicentre des transformations politiques et sociales du continent latino-américain. Après la chute du camp socialiste en URSS et en Europe orientale, c’était « la fin de l’histoire et des idéologies » selon le discours dominant. Mais en 1998, le président Hugo Chavez est élu président et remet à l’ordre du jour dans les débats la construction d’un système alternatif au capitalisme, « le socialisme du XXIe siècle ».
Je pense que c’est principalement pour cette raison que le Venezuela est attaqué sur tous les fronts : guerre économique, financière, diplomatique, médiatique et psychologique.
Le pays est soumis à ces attaques parce que c’est un exemple qui peut faire tache d’huile en Amérique latine et au-delà. Voilà pourquoi ce pays est diabolisé.
Quelles sont les relations entre le Chili et le Venezuela ?
Pablo Sepulveda Allende. Froides. Malheureusement, tous les gouvernements se qualifiant de « centre-gauche » qui ont gouverné le Chili après la dictature ont été hostiles au gouvernement vénézuélien. En général, ils se sont alignés avec la droite internationale.
C’est scandaleux car beaucoup de politiciens, dont certains ont fait partie du gouvernement de Salvador Allende, condamnent le gouvernement du Venezuela alors qu’ils ont vécu une expérience fort similaire sous Allende, avec des politiques sociales ambitieuses mises en œuvre et, en même temps, des tentatives de sabotages et de déstabilisation venant de l’extérieur. Les attaques subies par le Venezuela sont très semblables à celles qu’a dû affronter l’Unité populaire du Chili entre 1970 et 1973.
En quoi la situation du Venezuela ressemble-t-elle donc aux années Salvador Allende ?
Pablo Sepulveda Allende. Malgré les différents contextes historiques, les politiques de harcèlement économique sont très similaires. La constitution de stocks gigantesques de marchandises de première nécessité, la spéculation, la contrebande et la vente illégale à des prix excessifs qui en découlent ont été une stratégie sciemment appliquée dans les deux pays.
Au niveau international, lorsque le président Salvador Allende a été élu, le président des États-Unis de l’époque, Richard Nixon, a déclaré : « Nous allons faire hurler l’économie chilienne. » Il a organisé le blocus financier, refusant tout type de crédit au gouvernement chilien.
Actuellement, le Venezuela subit un blocus similaire. En outre, des banques telles que la Citibank ont bloqué des milliards de dollars appartenant à l’État vénézuélien. Ce qui l’empêche par exemple d’acheter sur les marchés étrangers de la nourriture ou des médicaments qu’il ne produit pas lui-même. Cela nuit aussi au développement du secteur productif du pays.
Les décrets présidentiels, récemment signés par Donald Trump, imposent des sanctions économiques et impliquent, entre autres, la confiscation des biens et des actifs financiers de toute entreprise qui négocierait avec le Venezuela.
Quels sont les points communs entre votre grand-père et Chavez ?
Pablo Sepulveda Allende. Salvador Allende a été le premier président socialiste a être élu par les urnes et non pas suite à un processus révolutionnaire, comme cela avait été le cas en Russie, en Chine et dans les luttes anti-coloniales. Au milieu de la guerre froide, c’était quelque chose d’inédit. Henry Kissinger a déclaré à l’époque qu’« Allende pourrait être plus dangereux que Fidel Castro » parce que si son exemple prospérait, il pourrait facilement se reproduire dans d’autres pays. Ils ont décidé d’effacer cette possibilité avec un coup d’État le 11 septembre 1973.
Près de 30 ans plus tard, Hugo Chávez arrive au pouvoir lui aussi par la voie des urnes. Cela a sans conteste servi d’inspiration pour les peuples progressistes de Bolivie, d’Equateur et du Nicaragua qui eux aussi ont élu un président progressiste.
Enfin, Hugo Chávez a souffert en 2002, également au cours de sa troisième année au pouvoir, d’un coup d’Etat militaire. Mais, à la différence du Chili de 1973, son issue fut positive car après 48 heures, Hugo Chavez était libéré de la cellule où il était enfermé par les putschistes suite à des grandes manifestations. Jamais auparavant, en Amérique latine, un coup d’État n’avait capoté suite à la réaction populaire.
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