Dans le passé, Cuba a été plusieurs fois victime d’attaques militaires par les États-Unis : bombardements aériens, soutien à des terroristes, attentats à la bombe, guerre biologique ainsi qu’une invasion militaire. Cela s’est toujours passé sur la base de fausses informations, « des faits alternatifs » pour paraphraser Trump. Cuba est donc bien placé pour contextualiser les attaques aux missiles contre la Syrie.
Rogelio Sierra Díaz, le vice-ministre cubain des Affaires étrangères, condamne l’attaque unilatérale du 6 avril par les États-Unis contre la base aérienne de Shayrat dans la province syrienne de Homs. (Granma, le 7 avril 2017)L’attaque, sous prétexte que le gouvernement syrien a utilisé des armes chimiques contre des civils, constitue une grave violation de la Charte des Nations Unies et du droit international. Elle est une violation de la souveraineté de la Syrie et ne fera qu’aiguiser le conflit dans le pays et dans la région et compliquer une solution négociée.
Cuba, qui a signé la Convention sur les Armes Chimiques, rejette l’utilisation d’armes chimiques par qui que ce soit et sous n’importe quelles conditions, y compris par des groupes terroristes.
L’attaque contre la Syrie a eu lieu avant même que l’Organisation pour l’Interdiction d’Armes Chimiques (abréviation anglaise OPCW), qui vérifie l’exécution de la Convention, ait pu réaliser une enquête impartiale, transparente et non politique. Il est inacceptable que l’on désigne un responsable sans que l’OPCW ne se soit prononcée.
Randy Alonso, journaliste cubain, directeur du site web cubadebate et du programme de télévision Mesa Redonda, publiait, le lendemain de l’attaque, un éditorial intitulé « Mensonges et missiles ».
Il y observe que la guerre est l’état naturel des empires. Peu importe les raisons pour lesquelles des conflits éclatent, et si il n’y en a pas, on les provoque ou on les invente. Le but, c’est de démontrer sa force, d’intimider les autres et de se montrer intouchable.
Trump n’a pas beaucoup tardé à commander des bombardements. Il l’a déjà fait au Yémen, à peine quelques jours après avoir été installé dans la Maison-Blanche. Après, il donnait l’ordre de bombarder l’Irak, et maintenant il fait la même chose en Syrie.
Assailli par les médias, une tentative ratée de liquider l’Obamacare, une popularité en chute et entouré par des faucons du complexe militaire-industriel, Trump a décidé d’entreprendre sa première action militaire étrangère de grande envergure, de montrer sa détermination et de contourner les critiques sur sa politique (interne).
La raison invoquée – l’utilisation prétendue d’armes chimiques par le gouvernement syrien – fait beaucoup penser à l’Irak de 2003. À cette époque, Sadam Houssein était accusé de disposer de puissantes armes chimiques qu’il pouvait déployer à tout moment, et il fallait dès lors envahir cette nation riche en pétrole. Ils n’ont toujours pas trouvé ces armes chimiques, a observé Lula, l’ancien président du Brésil, dans une interview à la radio.
Personne n’a sérieusement examiné la tragédie en Syrie. Il suffisait que des sources partisanes désignent le gouvernement syrien comme responsable et que des images d’enfants moribonds traversent le monde pour que Trump parle d’un carnage inacceptable.
Plusieurs analystes contestent ces accusations à l’égard du gouvernement syrien. Certains doutent que Damas soit encore en mesure de déployer des armes chimiques après les contrôles massifs réalisés en la matière. D’autres, comme Abded Rabbo, directeur du quotidien Al Watan, observent que le gouvernement d’Assad n’a aucun intérêt à mener une telle action, notamment au moment où Assad avait enfin obtenu la reconnaissance de sa légitimité par les États-Unis (paroles de Tillerson, ministre étasunien des affaires étrangères, en Turquie en mars). Pourquoi Assad lancerait-il une attaque chimique sur un endroit avec peu d’intérêt militaire ou stratégique ?
L’ampleur de ce qui s’est passé doit encore être évaluée, mais elle n’est nullement bénéfique à la stabilité et à la paix dans le monde. Les États-Unis s’apprêtent à nouveau à mener la guerre directe pour s’ingérer dans le conflit syrien. Trump délivre ainsi ses lettres de créance en tant que nouveau dirigeant impérial.
Avec cette attaque, Trump a abimé sa promesse électorale de chercher des alliés pour combattre les terroristes de Daech, considérés d’être l’ennemi principal des États-Unis. Sur le terrain, il a revitalisé les forces terroristes qui, ces dernières semaines, avaient souffert des pertes importantes.
En même temps, il montre qu’il prône les interventions unilatérales en matière de politique étrangère et qu’il déteste la concertation et les solutions négociées, comme l’ont remarqué diverses voix au Conseil de sécurité de l’ONU.
Source : CubadebateTrad. & rév. : E. Carpentier et H. Hansen